Billets d'humeur, Société

Changer d’âge

Temps de lecture : 1’11

Depuis quelques jours, une angoisse sourde me saisit quand la nuit tombe. Dans mon lit je me blottis en fœtus et je grelotte, en attendant que le sommeil me saisisse. Au petit matin, le soleil me réveille et je reprends vie.

Je change d’âge, et pour la première fois de ma vie ça me fait tout drôle. Ce n’est pas tant le nombre d’années cumulé mais le fait que ce soit arrivé si vite. Pourtant, on m’avait prévenue. Et il paraît que plus ça va, plus ça s’accélère. Enfant, je regardais les « grands » de 18 ans et je rêvais d’avoir leur âge, pour faire uniquement ce que je voudrais. Je m’imaginais une vie riche, absolument autonome et outrageusement provocante. Mais c’était dans longtemps, un temps qui me paraissait infini, qui ne cessait de s’étirer. Et voilà qu’en un claquement de doigts j’ai plus que deux fois 18 ans. Oui, c’est passé vite. Même s’il y a eu des époques qui m’ont paru bien longues et que j’aurais aimé abréger en deux temps, trois mouvements.

Prendre de l’âge, c’est se rapprocher de ceux qui nous ont donné la vie et s’éloigner de celui qu’on était quand on l’a reçue. On se rapproche de ses parents et parfois on les dépasse. On vit plus longtemps qu’eux. Désormais il nous faudra avancer en éclaireur, regarder devant avec pour seule indication sa propre boussole. Vivre plus longtemps que ses parents, surtout que celui du même sexe que soi, est une étape. On franchit un cap, on a contourné une côte, on a dépassé un rocher qu’on ne pourra plus regarder qu’en se retournant.

© Virginie Manchado, 2019

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