Billets d'humeur, Société

Journal du couvre-finement – 16 mai 2021

Temps de lecture : 10 minutes pile poil

Samedi 8 mai (suite)

Dans la boîte aux lettres : une lettre de Valérie Pécresse.

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Trois épisodes de Rendez-vous avec X, dont un dans lequel un type soignait des gens grâce aux recettes que leur dictaient les mouches qui bourdonnaient à son oreille et un autre qui guérissait grâce à une statuette qui parlait. Sinon les deux autres épisodes portent sur un agent russe et sur Mesrine.

Dimanche 9 mai

6 h 40, je me réveille en pleine forme. Le temps est comme je l’aime, tiède et nuageux. Le chat et moi sur le balcon, bien sûr je bricole les fleurs, monsieur dort, l’orage gronde, l’éclair, la pluie. Je suis au paradis. Je bois un bol de thé. Je finis le roman Gema. Le soleil se lève et il se remet à pleuvoir. Les oiseaux chantent. Ma mâchoire et mes dents me font tellement mal.

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Le poissonnier a deux chattes, deux sœurs, de sept mois, elles l’ont réveillé à 4 h 30, il n’est pas content.

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Dans la onzième pierre en partant du haut du mur de l’immeuble d’à côté, un couple d’oiseaux, des moineaux on dirait bien, vont et viennent. Peut-être nourrissent-ils leurs petits ?

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Découverte d’un nouveau coin où pique-niquer, je ne dis pas où c’est pour pas qu’on nous le pique.

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Après la balade, encore Rendez-vous avec X : la mort de Louis Renault.

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Quand j’étais jeune, j’avais la peau très blanche mais plus je vieillis et plus je bronze au moindre rayon de soleil. Par exemple, alors qu’il n’a pas fait grand soleil jusqu’à présent, j’ai déjà la marque de mes bagues. Suis-je la seule dans ce cas ?

Lundi 10 mai

Ce matin, je revêts ma chemise violette avec oiseaux en filigrane.

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14 heures : une fois n’est pas coutume, c’est moi qui suis interviewée pour un papier sur les indépendants qui paraîtra dans Les Échos du week-end fin juin. Puis je file chez l’ostéopathe. Par moments, j’ai tellement mal que je rêve qu’on m’arrache la moitié de la joue avec une tenaille.

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La fois où mon grand-père s’était cassé plusieurs côtes et qu’il souffrait, ma grand-mère avait dit « il jouit », moi je dis « je jongle ».

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L’index dans ma bouche, moi qui pleure, l’ostéopathe me dit « Votre chemise est super cool. »

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De retour chez moi, sur le canapé, sous la couverture, le chat, un bol de thé au lait, je regarder Les Beaux Jours en replay sur Arte. Je mange plein de biscuits aux pépites de chocolat.

Mardi 11 mai

J’aurais refilé le virus des fleurs sur le balcon à une amie, c’est mieux que le virus de la Covid-19.

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Je ne désespère pas de voir la mer et appelle l’hôtel pour utiliser mon avoir pour un week-end de juin. (cf post La Femme qui voulait voir la mer).

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Je mâchouille des clous de girofle à longueur de journée.

Mercredi 12 mai 

François, si tu lis ces lignes, sache que toi et moi, c’est fini. Maintenant, je suis en couple avec Jérémy. Ce matin, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, j’étais en chasse. C’est comme ça que je suis tombée sur Jérémy. Il m’a dit, « Viens à 12 h 30, je vais soigner ta pulpite ». Tu ne seras pas surpris si je te dis que j’étais à l’heure. À l’instant même où Jérémy m’invitait à l’attendre dans la salle d’attente, j’avais l’impression que l’on creusait un tunnel dans ma mâchoire inférieure, sous la 34 précisément, jusque sous mon menton avec des résonnances derrière l’oreille. Heureusement, il ne m’a pas fait attendre longtemps, là où toi tu me laissais poireauter plus d’une heure trente. Il m’a fait m’allonger dans son fauteuil incliné et tourner la tête sur le côté, il a précisé « Si tu peux tenir cette position, c’est parfait ». Pour tout dire, il m’aurait demandé de prendre n’importe quelle position, de ramper ou de marcher sur les mains, je l’aurais fait du moment qu’il m’anesthésiait. Ça a duré près d’une heure, pas mal pour une première fois. Il a beaucoup gesticulé, a changé d’objets plusieurs fois. Il a beaucoup parlé aussi, il me disait des choses du genre « Je suis derrière toi, Virginie, mais je suis avec toi, je prépare les outils ». Moi, je me suis contentée d’obéir à ses ordres, « Ouvre un peu plus la bouche, serre les dents, tourne-toi vers moi », qu’il a toujours exprimés avec la plus grande courtoisie. Il savait ce qu’il me faisait endurer mais il m’encourageait « Ça n’est pas facile, mais je sais que tu vas y arriver ». À un moment il y a eu un bruit d’élastique, chdoing, et ça nous a fait rire. J’ai bavé à plusieurs reprises, mais ça ne l’a pas gêné, il me faisait signe de ne pas m’en préoccuper, il avait ce qu’il fallait pour aspirer. À la fin il a dit « Dernière ligne droite pour toiaprès je te libère ». De nouveau debout sur mes deux jambes, tu ne peux pas savoir combien j’ai été soulagée. Ça faisait un petit moment, depuis mercredi dernier à dire vrai, depuis que j’avais croqué dans cette fraise de bon matin, que je ne m’étais pas sentie aussi bien. Puis est venu le moment où il m’a dit qu’il serait ravi de faire suivre le détail de ce qu’il avait fait, « le geste d’urgence, tout simplement » a-t-il précisé, à mon habituel, c’est-à-dire à toi, François. Et c’est là, que j’ai compris que toi et moi, ce n’était plus possible. Je savais depuis le début que je n’étais pas la seule (quatorze ans, pour mémo), mais j’avais cru que lorsque tu me disais que tu me rappellerais au plus vite après que je t’eus expliqué mes symptômes et dit courir aux urgences dentaires, tu me rappellerais, ne serait-ce que pour m’indiquer un de tes confrères moins gourmand que toi. Sans même prendre le temps d’y réfléchir, j’ai dit à Jérémy que tu m’avais déçue (rassure-toi, je n’ai pas cité ton nom) et que j’aimerais bien, s’il en était d’accord, que ce soit lui qui mon régulier dorénavant. En guise de réponse, il a souri. Je le revois la semaine prochaine, tu vois, Jérémy et moi ne perdons pas de temps. C’est vrai que son intérieur est moins rutilant que le tien, qu’il en jette moins comme on dit, mais il est là quand j’en ai besoin. Je t’ai bien aimé François, il m’est même arrivé de rêver de toi. Plus d’une fois je suis venue te retrouver dès 7 h 30 du matin, avant d’aller travailler. Je t’ai vu vieillir et blanchir, mais rester maître de ton bistouri. Je sais que tu as plein d’enfants de tout âge, certains qui te ruinent en centre aéré, d’autres en scooter et d’autres encore en école de commerce et que c’est pour ça que tu travailles de 7 heures du matin à 22 heures. Mais quelle est ma place dans tout ça François ? Nulle part, alors adieu.

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Après le dentiste, je cours à la Mairie du 12e où j’ai rendez-vous pour récupérer deux rouleaux de sacs à compost dans lequel nous jetons tous nos déchets alimentaires pour faire rouler des bus de ville (que nous n’empruntons presque jamais).

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Notre première fraise rougit de plus en plus, mais avec tout ce qui m’est arrivé depuis que j’en ai mangé une pour la dernière fois, j’ai peur de la goûter.

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Ce soir, je suis seule et je n’ai plus mal aux dents, alors c’est bulots et tartines au beurre fleur de sel devant un docu, n’importe lequel, sur Arte. Je plane.

Jeudi 13 mai 

C’est l’Ascension de mon compte en banque puisque les 100 € que j’avais retirés la semaine dernière sans en avoir vu la couleur sont de retour sur mon compte – on ne me les avait donc pas volés (cf. post du 9 mai 2021).

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Le monsieur devant moi chez le boucher prend sa commande, ça ressemble à une brochette mais sans pic et c’est de la viande rouge, j’attends qu’il soit parti pour demander au boucher ce que c’était : du rumsteak fourré au foie gras.

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Le poissonnier est très fatigué à cause de ses deux chattes, il en a enfermé une dans le frigo.

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Formidable documentaire sur les vaches, un troupeau en liberté plus exactement. La vache est une cousine de la girafe. J’adore les vaches.

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Ça y est, demande de permis de végétaliser effectuée.

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Qu’est-ce que j’apprends alors que je tente une sieste tardive ? Le chat est monté sur la rambarde du balcon – nous sommes au 6e étage. Mon petit cœur dégringole.

Vendredi 14 mai 

Religieusement, nous cueillons notre première fraise. Elle est très parfumée.

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Abeille qui butine le chèvrefeuille.

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C’est décidé, je ne commencerai pas à travailler avant 10 heures du matin. Il est 10 h 01 quand j’allume mon ordinateur.

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Remarque d’un lecteur de mon blog : « Tes petites histoires sont comme des petits bouts de tissu cousus un à un… Ils forment un plaid multicolore . Un peu comme lorsqu’on survole la campagne en avion.« 

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« Et si on regardait OSS 117 ? » « Chouette, je ne l’ai jamais vu ! » J’ai tenu quinze minutes.

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En parlant d’acteurs, on en arrive à se dire que Marion Cotillard a vraiment des yeux de poissons, mais que c’est normal parce qu’on descend tous du poisson. Lui décide qu’il descend du poulpe et moi de la sardine.

Samedi 15 mai

J’ai rêvé que la vendeuse d’une boutique de fringues que j’aimais beaucoup me disait que le masque, le couvre-feu et tout ça, c’était fini. Plus que deux jours à tenir et basta ! Du coup, j’achetais deux pantalons brillants et une paire de sandales dorées à très hauts talons. Ensuite, j’engueulais le nouveau responsable de la boutique qui n’était pas sympa avec la vendeuse. Puis je rentrais chez moi sous la pluie, je courais, je courais avec mes hauts talons dorés.

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Chez un fleuriste : plante sensitive, chez un autre : des campanules vivaces.

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Après la balade : second visionnage du docu sur les vaches. Ce sont mes racines paysannes qui s’expriment. Puis je m’en vais dire à José, à qui j’avais acheté les trois plants, que nous avons dégusté notre première mara des bois, il est très fier.

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Réponse positive de la Mairie de Paris pour mon permis de végétaliser, mais pas l’arbre que je voulais, un autre, sur une placette toute mignonne avec fontaine tout près de chez moi.

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Vue sur Paris depuis le Père-Lachaise le temps d’une éclaircie,
tout près de la tombe de Michel Delpech et de Colette.
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